Inspection du feu – Dans la peau d’un spécialiste en protection incendie

Dans le canton de Fribourg, la loi prévoit que les immeubles d’habitation sont soumis à un contrôle de protection incendie – une inspection du feu – tous les dix ans. Cette inspection permet de vérifier si les exigences en matière de protection incendie sont remplies dans les locaux. Le contrôle porte notamment sur des mesures constructives, comme les portes coupe-feu, sur des mesures techniques, comme un système de désenfumage, ou sur des mesures de protection incendie organisationnelles portant par exemple sur l’entreposage de matériaux.

Angelo Lauper est mandaté par plusieurs communes du canton de Fribourg pour effectuer ce genre de contrôle. Les communes, quant à elles, reçoivent le mandat légal de l’établissement cantonal d’assurance des bâtiments. Le CIPI a accompagné Angelo Lauper lors d’une inspection.

Au programme aujourd’hui : l’inspection de deux immeubles d’habitation et de leur garage souterrain. Les propriétaires ont été informés au préalable de la venue d’Angelo Lauper. Les contrôles ont lieu après concertation avec la commune. Deux semaines avant la date fixée, les propriétaires reçoivent une « convocation à l’inspection du feu ». Les visites ont lieu en leur présence. Parfois, la ou le concierge représente les propriétaires sur place et assure l’accessibilité des locaux.

C’est parti...

Nous commençons notre visite par le garage souterrain. Nous remarquons de suite la Fiche d’information « Sécurité incendie dans les parkings souterrains » affichée en plusieurs exemplaires sur les murs. C’est de bon augure pour la suite. Le concierge sensibilise les locataires aux sources de dangers. C’est bien !

Angelo Lauper parcourt l’ensemble du parking souterrain pour un premier état des lieux. Il y a de grandes ouvertures dans les murs en béton, équipées de grilles à mailles fines. Angelo explique : « En cas d’incendie, les sapeurs-pompiers peuvent envoyer de l’air par les grilles pour dégager la fumée qui peut également s’échapper par ces ouvertures. C’est ce que l’on appelle la ventilation tactique. »

Ce parking souterrain privé mesure plus de 600 m2. Les mesures de protection incendie en vigueur ici sont plus sévères que pour des garages de moins de 600 m2. Elles concernent principalement l’entreposage de matériaux. Ainsi, l’entreposage de matériaux combustibles comme des meubles, du bois de chauffage ou du carton n’est pas autorisé. Dans le garage contrôlé, il n’y a presque aucun manquement à ce niveau.

Seules quelques boîtes en carton déposées de manière irrégulière sur une place de parc doivent être débarrassées. Pourquoi ? Voir Sécurité incendie dans les parkings souterrains

Dans le parking souterrain, Angelo Lauper vérifie l’éclairage de secours. En cas de coupure d’électricité, l’éclairage de secours doit permettre de trouver son chemin vers l’extérieur du parking souterrain. Dans ce garage, l’éclairage de secours fonctionne parfaitement.

Le parking est doté de plusieurs sorties de secours. La règle prévoit qu’une sortie de secours doit être accessible à 35 mètres maximum depuis n’importe quel point du parking souterrain, et qu’elle doit impérativement mener à l’air libre.

Dans le garage contrôlé, cet aspect nécessite quelques améliorations. Une des portes existantes doit être transformée en sortie de secours. Cela requiert l’installation d’un panneau lumineux au-dessus de la porte et le remplacement de la serrure. Ainsi, la porte ne pourra plus être verrouillée et s’ouvrira d’un seul geste dans le sens de fuite.

Bouteille de gaz dans la cave ?

Après l’inspection du garage souterrain, la visite se poursuit dans l’un des immeubles d’habitation. Nous commençons par les caves où il n’est pas rare que les habitants commettent l’erreur d’y entreposer des bouteilles de gaz. Le spécialiste en protection incendie, Angelo Lauper, constate cette irrégularité ici aussi. « L’entreposage de bouteilles de gaz dans les caves est strictement interdit à cause du risque de fuite », explique Angelo Lauper au concierge. Celui-ci acquiesce et promet d’attirer l’attention des locataires sur ce point.

Vous êtes responsable

Il est de la responsabilité individuelle des propriétaires et des locataires de veiller à ce que les mesures de protection incendie soient respectées, et à ce que la sécurité des personnes et des biens soit garantie. Êtes-vous au clair sur vos responsabilités ?

Vos devoirs en tant que propriétaire ou locataire

Porte coupe-feu fermée ?

Angelo Lauper vérifie aussi les mesures constructives de prévention incendie, et notamment la porte coupe-feu. Une cave avec une porte coupe-feu constitue un compartiment coupe-feu. En cas d’incendie dans une cave, cela permet d’éviter que le feu et la fumée envahissent rapidement la cage d’escalier à condition, bien sûr, que la porte soit fermée. La plaquette AEAI sur la porte indique la classe de résistance au feu et renseigne sur la durée pendant laquelle elle peut résister au feu.

Dans le bâtiment inspecté, nous découvrons une porte coupe-feu de la classe de résistance au feu EI 30. En cas d’incendie, le feu serait arrêté au moins 30 minutes par cette porte. Néanmoins, Angelo Lauper remarque une cale sous la porte. Il en réfère au concierge et en profite pour lui expliquer pourquoi la porte coupe-feu doit rester fermée. « Pour que ces portes puissent remplir leur rôle, elles doivent toujours être fermées. Il est donc strictement interdit de les maintenir ouvertes avec une cale en bois ou autre. »

Le concierge est tout ouïe et ne manquera pas d’en informer aussi les locataires.

Dans la chaufferie

De la cave, nous rejoignons la chaufferie. En fonction du type de chauffage, la chaufferie doit répondre à des exigences spécifiques. Ainsi, dans le cas d’un chauffage au mazout, la porte doit être fermée et le local ventilé. Le bâtiment d’habitation inspecté est chauffé par une pompe à chaleur. Dans le local, des vélos et des tondeuses à gazon sont également entreposés. En soi, cela n’est pas interdit, mais seulement jusqu’à une puissance de 70 kW. D’un point de vue de la prévention incendie, tout est donc conforme dans ce local.

Dans le couloir de la cave, les fusibles non protégés nous sautent aux yeux. « Aujourd’hui, ils ne pourraient plus être installés sans protection », explique Angelo Lauper. « Dans les nouvelles constructions, les fusibles sont logés dans des boîtiers prévus à cet effet ou dans un local séparé, la priorité étant de prévenir les incendies. »

Néanmoins, il n’existe aucune obligation de remplacer les installations de fusibles dans les immeubles d’habitation anciens (garantie des droits acquis).

Coup de projecteur sur la cage d’escalier

Après la visite de la cave, nous voici dans la cage d’escalier. Une cage d’escalier constitue systématiquement une voie d’évacuation et de sauvetage verticale. D’où les questions suivantes : La cage d’escalier est-elle dégagée et praticable de manière sûre en tant que voie d’évacuation ? La largeur de passage de 1,20 m est-elle respectée ?

Nous remarquons une armoire à chaussures blanche. Elle est en bois et est posée contre le mur entre la porte d’entrée et l’escalier. Angelo Lauper saisit son mètre. La largeur mesurée est de 80 cm entre l’armoire à chaussures et la rampe d’escalier. Ce n’est pas assez. L’armoire ne peut pas rester à cet endroit.

En dehors du fait qu’elle prend trop de place, elle est en bois. Et pour autant qu’il y ait la place suffisante, seules les armoires à chaussures en matériaux non combustibles, comme le métal, sont autorisées. En cas d’incendie, tous les résidents doivent pouvoir emprunter la voie d’évacuation. Or, tout objet combustible qui s’y trouve peut prendre feu et ainsi empêcher l’accès à la voie d’évacuation. Les habitants ne pourraient donc plus fuir par les escaliers et les services de secours n’accéderaient plus rapidement aux étages supérieurs.

« Les cages d’escalier doivent en tout temps être dégagées et praticables en toute sécurité. Elles ne doivent pas servir à d’autres usages. »

Ainsi, un appartement ne peut pas « s’étendre » sur la cage d’escalier. Nous découvrons des aménagements non autorisés dans les deux bâtiments contrôlés. Parmi eux, un palier joliment décoré avec un tapis, une armoire et une étagère à chaussures, une chaise et des plantes. Ces meubles doivent être enlevés.

Dans l’entrée et aux étages intermédiaires, des rideaux sont posés aux fenêtres sur toute la hauteur. Ils sont certes décoratifs et apportent une touche chaleureuse à la cage d’escalier, mais ils n’en représentent pas moins un risque en termes de protection incendie. En effet, les rideaux sont très inflammables. Angelo Lauper recommande de les décrocher.

Peut-être vous demandez-vous ce qui est autorisé dans une cage d’escalier ? Sont tolérés dans les voies d’évacuation, les paillassons, quelques photos, les porte-parapluies.

Pour autant que la largeur minimale de 1,20 m soit respectée dans les voies d’évacuation, chaque appartement peut disposer d’un meuble à chaussures fermé, fixé au mur, en matériau incombustible.  

 

Un coffret de commande pour l’extraction de la fumée est fixé au mur dans la cage d’escalier de l’immeuble le plus récent. L’actionnement du commutateur entraîne l’ouverture des fenêtres raccordées. Un tel système de désenfumage sert à évacuer la fumée qui se trouve à l’intérieur d’un bâtiment vers l’extérieur. Ce faisant, la voie d’évacuation est en partie libérée de la fumée. Elle peut même être complètement libre de fumée pendant un certain temps. À la différence du garage souterrain où les ouvertures sont permanentes, l’ouverture des fenêtres est assurée par une solution technique.

À la fin du contrôle

Après un contrôle de l’ensemble des locaux et installations techniques, l’inspection périodique d’une heure se termine. Angelo Lauper revient directement sur chaque irrégularité constatée ainsi que sur les mesures à prendre pour y remédier. À la suite du contrôle, les propriétaires recevront un exemplaire de son rapport, qui prévoit notamment les délais impartis pour corriger les irrégularités. En principe, une visite de contrôle a lieu trois à six mois après l’inspection.

L’inspection du feu d’aujourd’hui n’a révélé que quelques irrégularités, dont a pris note le concierge. En désignant sur place chacune des irrégularités et en expliquant les mesures de correction envisageables, Angelo Lauper souhaite renforcer la compréhension des exigences et donner des pistes de solutions. C’est ce qu’il a d’ailleurs réussi à faire lors de cette inspection. Et il se montre confiant quant à l’issue de la prochaine visite de contrôle sur place.

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