Les causes d’incendies dans l’agriculture
Les incendies dans les exploitations agricoles sont fréquents et peuvent entraîner des conséquences dramatiques. La présence de nombreux matériaux inflammables (foin, bois, carburant), les spécificités architecturales et la concentration de machines et d’appareils font des fermes des cibles particulièrement vulnérables.
Comme dans les bâtiments d’habitation, la négligence est à l’origine de nombreux incendies survenant dans les exploitations agricoles : installations électriques défectueuses, appareils chauds trop proches de matériaux combustibles ou cheminées mal entretenues. Dans cet article, nous passons en revue les principales causes d’incendie dans les bâtiments agricoles.
Nombre d’incendies et ampleur des dommages
Entre 2005 et 2015, le nombre d’incendies dans les bâtiments agricoles a diminué sans discontinuer. Néanmoins, depuis 2016, ce chiffre plafonne. En moyenne, les 19 établissements d’assurance cantonaux ont enregistré 400 incendies par an dans des bâtiments agricoles au cours des 10 dernières années. Au niveau national, cela correspond à quelque 500 incendies par an.
Nombre d’incendies dans des bâtiments agricoles
Ces 400 incendies enregistrés ont causé en moyenne 24 millions de francs de dommages annuels au cours des 10 dernières années, soit environ 30 millions de francs par an pour l’ensemble de la Suisse. Ce montant concerne uniquement les bâtiments et n’inclut pas les dommages aux animaux, aux biens mobiliers ou aux véhicules.
Montant des dommages dans les bâtiments agricoles :
Quelles sont les causes ?
L’analyse statistique des dix dernières années montre que les causes des incendies sont variées, allant de la foudre aux installations de combustion, en passant par la combustion spontanée du foin.
Part moyenne des causes (principales catégories) dans le nombre d’incendies
Les trois causes de dommages les plus fréquentes
Examinons de plus près les trois causes de dommages les plus fréquentes de ces dix dernières années : la foudre, l’électricité et les installations de combustion.
1. La foudre
La foudre est, de loin, la principale cause de dommages aux bâtiments. Parmi l'ensemble des dommages enregistrés, les bâtiments agricoles sont particulièrement touchés, représentant 50,7 % des cas, soit une proportion nettement supérieure à la moyenne. Cette vulnérabilité s’explique par l’emplacement souvent isolé et exposé des exploitations.
On distingue deux types d’impacts de foudre : les impacts directs, lorsqu’un bâtiment est frappé de plein fouet, et les impacts indirects, lorsque la foudre tombe à proximité et que l’énergie est transmise par les lignes électriques. Dans ce dernier cas, les installations électriques et les appareils qui y sont raccordés peuvent être gravement endommagés, et cela peut provoquer des incendies ou des dommages corporels.
- Les impacts de foudre indirects représentent 38,6 % de tous les dommages causés aux bâtiments agricoles. Il faut toutefois souligner que les dommages qu’ils provoquent restent généralement limités, provoquant surtout des surtensions dans les installations électriques.
- Un impact de foudre direct, en revanche, libère une énergie énorme en quelques fractions de seconde et peut générer des températures allant jusqu’à 30 000 °C. Un bâtiment non protégé peut alors s’embraser instantanément. De plus, l’évaporation explosive de l’humidité contenue dans les éléments de construction peut projeter des débris très dangereux pour les personnes et les animaux.
Même si les bâtiments agricoles sont souvent touchés par la foudre, la part des dommages causés par la foudre dans les dommages totaux reste limitée : 2,1 % pour les impacts de foudre indirects et 5,0 % pour les impacts de foudre directs. Un système de protection contre la foudre adapté permet d’éviter la plupart de ces dommages.
2. L’électricité
La situation est différente pour les dommages causés par l’électricité, c’est-à-dire par les installations et les appareils électriques. Ils représentent à eux seuls 21,9 % du montant total des dommages enregistrés dans l’agriculture.
Les installations électriques défectueuses sont responsables de 6,0 % de l'ensemble des incendies. Il peut s’agir de câbles vétustes, de raccordements défectueux, de câbles grignotés par des rongeurs ou de circuits électriques en surcharge. Les installations électriques figurent ainsi parmi les principales causes d’incendie. Il est donc important que les installations électriques soient réalisées dans les règles de l’art pour garantir la sécurité. Renoncez à installer vous-même le système électrique et faites plutôt appel à des professionnels. Il est également recommandé d’équiper vos bâtiments d’un dispositif de protection contre les arcs électriques (AFDD – « disjoncteur de protection incendie »).
Les appareils électriques comportent eux aussi un large éventail de risques : ils peuvent présenter des signes d'usure, des fiches ou des câbles endommagés, ou des défauts techniques. Les appareils électriques défectueux ne représentent toutefois que 3,3 % des causes d'incendies.
À cela s’ajoutent les incendies dus à une utilisation inappropriée des appareils, par exemple lors de la recharge de batteries lithium-ion ou de travaux de ponçage, de meulage ou de découpe. Leur proportion s’élève à 1,4 %. À noter que ce chiffre reste nettement plus bas dans les bâtiments agricoles que dans les bâtiments d’habitation, ce qui tend à démontrer que les agriculteurs maîtrisent généralement bien l’usage de leurs appareils électriques.
3. Les installations de combustion
Cette catégorie englobe les systèmes de chauffage, les poêles, cheminées, conduits de fumée et la cendre. Il faut préciser que ces incendies prennent souvent naissance dans les bâtiments d’habitation avant de se propager aux bâtiments d’exploitation, qui ne sont généralement pas chauffés. Les valeurs indiquées se réfèrent donc aux bâtiments d’exploitation, mais leur origine se trouve souvent du côté résidentiel.
Une comparaison avec les autres types de bâtiments montre que l’agriculture est proportionnellement plus touchée : 4,7 % des incendies sont dus aux conduits de fumée et 1,5 % aux systèmes de chauffage central.
Pourquoi retrouve-t-on une proportion aussi élevée d’incendies liés aux conduits de fumée, chauffages centraux et poêles dans les fermes ? Une explication possible :
Dans les exploitations agricoles comprenant une partie habitable, on se chauffe très souvent avec son propre bois. Or, l’utilisation de combustibles inadaptés comme du bois humide ou des déchets provoque fréquemment des feux de suie. Un chauffage trop intense ou des projections d’étincelles peuvent également être à l’origine d’un incendie. Le risque réside donc principalement dans une mauvaise utilisation des installations par les usagers plutôt que dans les installations elles-mêmes.
À l’inverse, dans d’autres types de bâtiments, on recourt davantage à des systèmes de chauffage automatisés – pompes à chaleur, chauffage au fioul ou chauffage à distance – qui nécessitent beaucoup moins de manipulation.
Causes d’incendie particulières
Examinons maintenant de plus près d’autres causes d’incendie, toujours sur la base des données des dix dernières années.
Feu utilitaire
La catégorie « feu utilitaire » regroupe toutes les situations où le feu est utilisé délibérément : allumettes, briquets, bougies et articles de tabac, mais aussi travaux de soudage, de meulage ou de brasage. Ces derniers, appelés travaux à chaud, sont fréquents dans les exploitations agricoles. Cette catégorie représente 3,5 % des incendies, mais 5,8 % du montant total des dommages. Une statistique qui illustre bien à quel point des flammes nues combinées avec du foin, de la paille ou du bois peut être explosive.
Fait marquant : la sous-catégorie « articles de tabac » n’est responsable que de 0,3 % des incendies dans les bâtiments agricoles, contre 1,9 % en moyenne dans les autres types de bâtiments. Le secteur agricole semble appliquer avec succès une règle simple et efficace : « on ne fume pas à l’intérieur » – et cette discipline porte visiblement ses fruits.
Combustion spontanée
Dans cette catégorie, la « combustion spontanée du foin » mérite une attention particulière. Bien que ce phénomène reste rare en Suisse, il ne doit pas être sous-estimé. Cette cause ne représente que 0,7 % du nombre total d’incendies, mais pèse pour 2,6 % dans le montant total des dommages. En d’autres termes : lorsqu’un tel incendie survient, les dégâts sont souvent considérables.
Véhicules à moteur
Les « véhicules à moteur » provoquent proportionnellement plus de dégâts dans les exploitations agricoles que dans d’autres types de bâtiments : ils sont à l’origine de seulement 1,1 % des incendies, mais représentent 4,2 % du montant total des dommages. Cette cause est classée sous la catégorie « autres causes connues ». La raison est probablement la suivante : les véhicules, dont les moteurs sont souvent encore chauds, sont garés à proximité immédiate de matériaux très inflammables, comme des tracteurs stationnés dans une entrée surélevée, près d’un entrepôt de fourrage ou sous un auvent d’étable. Dans d’autres types de bâtiments, les véhicules sont généralement garés sous des auvents, dans des parkings souterrains ou sur des places de stationnement extérieures.
Incendies intentionnels
Avec 1,9 % des cas, les « incendies intentionnels » sont moins fréquents dans les exploitations agricoles que dans les autres types de bâtiments (3,1 %). Les raisons restent difficiles à expliquer. Peut-être la crainte des conséquences catastrophiques d’un incendie dans une ferme ? Ou encore l’effet dissuasif d’une présence quasi permanente dans la cour, renforcée par celle d’un chien de garde.
Ces valeurs faibles concernent surtout les incendies criminels commis par des tiers ou des inconnus. En revanche, la proportion d’incendies volontaires imputables aux propriétaires eux-mêmes ou à leur entourage proche est, elle, supérieure à la moyenne observée dans les autres catégories de bâtiments.
Causes inconnues
Les « causes inconnues » sont responsables de 12,4 % des incendies. Cela signifie que l’origine de l’incendie n’a pas pu être déterminée. Ces causes inconnues représentent pourtant plus de 40 % du montant moyen des dommages, soit une part nettement supérieure à la moyenne. La raison en est simple : lorsque les dégâts sont très importants, le feu a souvent ravagé les lieux au point qu’il devient extrêmement difficile, voire impossible, de trouver des indices permettant d’en déterminer la cause.
Prévention des incendies dans l’agriculture
L’économie agricole suisse compte plus de 47 000 exploitations1). Ce nombre élevé, associé à la grande quantité d’animaux de rente logés dans les étables et les granges, souligne l’ampleur de la responsabilité liée à la prévention des incendies.
Pour renforcer la sécurité dans ce contexte particulier, le Centre d’information pour la prévention des incendies (CIPI) et le Service de prévention des accidents dans l’agriculture (SPAA) ont conclu un partenariat. Leur objectif : sensibiliser les responsables d’exploitations agricoles, leurs familles et leurs collaborateurs aux dangers d’incendie et leur proposer des mesures de prévention faciles à mettre en œuvre.
Pour atteindre cet objectif, le CIPI et le SPAA œuvrent à l’élaboration de fiches d’information, d’articles spécialisés et de dépliants consacrés à cette thématique. Au cours des prochains mois, ces informations seront mises gratuitement à disposition des exploitations agricoles. Ce contenu sera également diffusé dans le matériel pédagogique des formations agricoles, dans le cadre de salons et manifestations du secteur agricole ainsi que sur divers portails en ligne.
Vous trouverez plus d’informations à ce sujet sur :
www.bul.ch/fr-ch/prevention-des-incendies