Incendies causés par des enfants – Qui est responsable aux yeux de loi ?
Beaucoup d’enfants sont fascinés par le feu et, entre six et dix ans, ils sont par ailleurs particulièrement joueurs et imitent tout ce qu’ils voient. Ils observent les adultes ou leurs frères et sœurs aînés manier le feu, ce qui éveille leur curiosité. Cela devient problématique lorsqu’ils ne sont pas encore en mesure d’évaluer les conséquences de leurs actes : c’est ainsi que des enfants déclenchent encore et toujours des incendies.
Après un drame, de nombreuses questions se posent rapidement : mon enfant est-il tenu pour responsable ? Est-il déjà capable de discernement ? Sommes-nous, en tant que parents, également tenus pour responsables ? Et enfin et surtout : qui paie les dommages ?
Au travers de deux scénarios mettant en scène des incendies causés par des enfants, nous vous présentons les conséquences d’une telle situation. Scénario 1 : deux enfants de sept ans jouent avec des allumettes dans un garage. Ils perdent le contrôle des flammes et déclenchent un incendie important. Scénario 2 : trois adolescents de quinze ans allument un feu dont ils perdent le contrôle.
Un enfant est-il tenu pour responsable en cas d’incendie ?
En principe, les enfants de moins de 18 ans ne peuvent être considérés comme responsables de dommages que s’ils sont capables de discernement. L’art. 16 du Code civil prévoit que « toute personne qui n’est pas privée de la faculté d’agir raisonnablement en raison de son jeune âge […] est capable de discernement au sens de la présente loi ». En d’autres termes : les enfants sont considérés comme responsables de tous leurs actes dès lors qu’ils sont en mesure, sur la base de leur capacité de discernement, d’en évaluer les conséquences. Un enfant est donc capable de discernement uniquement s’il peut mesurer les implications de ses actes et se comporter en conséquence.
« Un enfant est capable de discernement uniquement s’il peut mesurer les implications de ses actes et se comporter en conséquence. »
À partir de quel âge un enfant est-il capable de discernement ?
Il n’est pas possible de fixer un seuil d’âge universel à partir duquel un enfant est capable de discernement. Comme souvent en droit, les situations doivent être jugées au cas par cas. Les enfants sont considérés comme capables de discernement partout où ils peuvent se mouvoir librement en fonction de leur âge : sur la place de jeu, dans la rue ou à un match de football. Il est déjà arrivé qu’un juge confirme la capacité de discernement d’un enfant de six ans qui avait blessé un piéton avec son tricycle.
Dans de nombreux cas, un enfant est toutefois considéré comme capable de discernement à partir de neuf ans seulement. À partir de cet âge-là, on considère qu’il est en mesure de comprendre des liens simples. Un tribunal a par exemple déjà reconnu la capacité de discernement de trois garçons de cet âge-là qui, en jouant avec des allumettes, avaient mis le feu à une grange.
Les enfants de sept ans sont-ils tenus pour responsables des dommages ?
Si des enfants de sept ans connaissent les dangers des allumettes, ils sont considérés comme capables de discernement et sont considérés comme responsables. Leur jeune âge justifie toutefois une réduction de l’indemnisation imposée. En principe, la règle suivante s’applique : plus l’enfant est âgé et plus il est coupable, plus il est probable qu’il doive rembourser l’entièreté des dommages. Considérer des enfants capables de discernement comme responsables n’apporte toutefois que peu à la personne lésée, les enfants étant en règle générale sans moyens financiers. Ce sont généralement les parents qui répondent alors des dommages causés par leurs enfants mineurs.
Les parents sont-ils tenus pour responsables à la place de leurs enfants ?
Ce sont en premier lieu les enfants eux-mêmes qui sont considérés comme responsables. Les parents ne sont tenus pour responsables des dommages causés par leurs enfants mineurs que s’ils ont failli à leur devoir de surveillance. L’art. 333 du Code civil prévoit ainsi : « Le chef de la famille est responsable du dommage causé par les mineurs […] placés sous son autorité, à moins qu’il ne justifie les avoir surveillés de la manière usitée et avec l’attention commandée par les circonstances. »
Dans les faits, les parents sont rarement jugés responsables des actes de leurs enfants. Ils ont toutefois un devoir de surveillance et de responsabilité selon l’âge de leur progéniture. Le degré d’attention doit être d’autant plus élevé que leur enfant est jeune et inexpérimenté. Une surveillance permanente n’est toutefois pas attendue, même pour les très jeunes enfants.
En fonction de leur âge, ils ont en effet le droit de jouer seuls, d’aller faire des courses, de se rendre seuls à l’école ou de faire du sport. Si par exemple des parents laissent jouer sans surveillance et pendant un long moment leur jeune enfant sur la place de jeu et que celui-ci fait tomber un autre enfant de la tour de grimpe, ils ont alors failli à leur devoir de surveillance. En ce qui concerne les actions dangereuses telles que la manipulation d’allumettes, les parents remplissent leur devoir de surveillance lorsqu’ils avertissent et instruisent leurs enfants en fonction de leur âge et, s’ils le jugent nécessaire, qu’ils leur interdisent de toucher aux allumettes.
« Les parents ont un devoir de surveillance et de responsabilité selon l’âge de leurs enfants. »
Les parents sont-ils jugés responsables des actes de leur enfant de sept ans ?
Si les parents ont rempli leur devoir de surveillance en interdisant à leur enfant de jouer avec des allumettes, ils ne sont pas responsables ; la situation est différente s’ils ont eux-mêmes donné la boîte d’allumettes à leur enfant.
Qu’en est-il pour les adolescents de quinze ans ?
Les parents ne peuvent pas contrôler tous les faits et gestes de leurs adolescents de quinze ans. Cela signifie que les parents ne sont pas responsables et que les adolescents doivent assumer seuls les dommages.
Expliquez à votre enfant les dangers du feu
Ces différents scénarios mettent en lumière l’importance d’instruire les enfants en fonction de leur âge par rapport au feu et de leur parler des conséquences possibles. Ils doivent apprendre dès le plus jeune âge à reconnaître les dangers potentiels et à mieux évaluer les conséquences de leurs actes. Vous trouverez ici des conseils à ce propos :
Et qui paie les dommages ?
Dans le cas de dommages causés à un bâtiment en raison d’un incendie, c’est en règle générale l’établissement cantonal d’assurance qui les prend en charge, et ce, peu importe l’auteur et sa responsabilité.
Après que l’établissement cantonal d’assurance a indemnisé le propriétaire, se pose alors la question de savoir si et dans quelle mesure il est possible de se retourner contre l’auteur du dommage.
- Si l’enfant n’est pas capable de discernement et que les parents ont rempli leur devoir de surveillance, personne n’est tenu de verser des dommages et intérêts. L’établissement cantonal d’assurance assume alors à lui seul les dommages.
- Si les parents n’ont pas rempli leur devoir de surveillance, ils sont responsables du dommage. L’établissement cantonal d’assurance fera recours pour le dommage auprès des parents.
- Si l’enfant est capable de discernement et que les parents ont rempli leur devoir de surveillance, l’enfant doit payer lui-même le dommage intentionnel ou par négligence. Sur le plan légal, les parents ne sont pas tenus de verser ce montant, mais en pratique, ce sont le plus souvent eux qui assument le dommage. S’ils ont conclu une assurance responsabilité civile privée, celle-ci couvre généralement les coûts si l’enfant est capable de discernement et qu’il est responsable d’un dommage causé par négligence. Il en est autrement si l’enfant a causé le dommage de manière intentionnelle et qu’il est considéré par le tribunal comme suffisamment mature pour mesurer la portée de ses actes : il doit alors assumer seul les conséquences. Ni les parents ni l’assurance responsabilité civile privée ne sont tenus de prendre en charge les dommages. Si le montant du dommage est élevé, le sinistre peut nuire de manière durable à l’avenir de l’enfant, car s’il ne possède pas suffisamment d’argent pour régler les dommages, il devra entamer sa vie d’adulte avec des dettes.